L’Alsace renaît en tant qu’entité administrative, mais dans un contexte désincarné, résolument pro-UE.
La puissance de certains symboles fait passer au second plan les réalités qu’ils dissimulent. C’est le cas du retour de l’Alsace, orpheline d’une existence administrative depuis son incorporation à la région Grand Est le 1er janvier 2016, qui va (presque) renaître de ses cendres le 2 janvier 2021 sous la forme d’une entité juridique hybride et inédite, la Collectivité européenne d’Alsace (CEA)1. Que se cache-t-il derrière cette collectivité qui revendique, dans son intitulé, son appartenance à l’Union européenne davantage qu’à la France ?
D’aucuns y verront un symbole de renaissance de l’Alsace dans l’ouverture, l’élargissement vers d’autres horizons. D’autres, une manière d’afficher la dimension internationale de la région transfrontalière. Pourtant, les compétences élargies de cette nouvelle collectivité, ni région, ni département, sont autant de distances prises avec la France et d’allégeance symbolique à Berlin et Bruxelles sans pour autant célébrer l’identité de l’Alsace. Si la CEA reste attachée à la région Grand-Est sans être dotée d’un statut particulier, elle pourra néanmoins, dotée de compétences spécifiques et d’un budget de 2 milliards d’euros, décider par exemple de sa politique en matière de langue et recruter des enseignants d’allemand en complément des programmes scolaires nationaux.
Les Alsaciens devront se contenter d’un acronyme technocratique, pro-UE, déraciné, désincarné.
Mais ce n’est pas tout. À ses compétences historiques viennent s’ajouter des compétences supplémentaires inscrites dans la loi du 2 août 2019. L’État transfère ainsi à la Collectivité européenne d’Alsace la gestion de 300 kilomètres de routes et autoroutes, dont l’A35, ce qui pourrait relancer localement le projet d’écotaxe poids lourds supprimé imprudemment par Ségolène Royal 2 lorsqu’elle était ministre. La CEA devient également « Chef de file » en matière de coopération transfrontalière et coordonne les initiatives de promotion touristique de la région.
De nombreux Alsaciens voulaient voir renaître l’Alsace, dont l’identité avait été dissoute dans la région Grand-Est, en tant qu’entité administrative et juridique. Ils devront se contenter d’un acronyme technocratique, pro-UE, déraciné, désincarné, qualifié par certains médias progressistes 3 de « grande première européenne ». L’Alsace est morte, vive la CEA ?
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