par Pascal TRAN-HUU
Après quelques dizaines de minutes, la petite eau sort de l’alambic à 68°. Une surveillance constante du processus doit être observé tout au long des cinq heures que dure la première cuisson…
Une fois que le degré d’alcool de la petite eau a atteint le minimum que s’est fixé le bouilleur de cru, en l’occurrence 20° pour nous, on coupe le feu et on procède au vidage et au nettoyage de la cuve. Pour vérifier le degré alcoolique, le bouilleur de cru dispose de deux méthodes : par le pèse-alcool ou de manière empirique. En ce qui me concerne, je préfère la manière empirique qui consiste à brûler un peu du liquide qui sort de l’alambic et à mesurer, à l’œil, la quantité d’eau restante car elle est beaucoup plus esthétique.
Une fois les opérations de nettoyage terminées, on verse la petite eau dans le chaudron, on le ferme et on met en chauffe à feu doux, très doux… (souvenez-vous de Raymond Lulle…), c’est ce qu’on appelle la « Bonne chauffe ». L’art du bouilleur de cru va, de nouveau, se montrer. En effet, l’alcool qui va sortir de l’alambic est composé de trois parties : la « tête de raffin », le « cœur de raffin » et la queue de « raffin ». Seul le cœur de raffin est utilisé car la tête contient du méthanol et la queue n’est plus assez aromatique de plus elle contient un taux d’alcool insuffisant. C’est à l’odeur que notre bouilleur de cru va séparer la tête, qu’il utilisera à des fins de nettoyage ou dans le lave-glace de sa voiture. Le pèse-alcool servira de nouveau pour séparer la queue qui sera remise dans la « soupe » de l’année suivante. En résumé la trilogie des actions à mener pour mener à bien la bonne chauffe est de renifler, goûter et mesurer le taux d’alcool…
Le cœur de raffin est coupé à l’eau d’Evian, qui est une eau peu minéralisée afin d’éviter les problèmes de précipitations calcaires, jusqu’à atteindre le taux d’alcool désiré, dans notre cas 48°. On transvase l’ensemble dans une dame-jeanne que l’on stocke, le goulot recouvert d’un bout de tissu en coton, pendant 6 semaines pour lui faire perdre son feu, c’est-à-dire adoucir le goût (c’est en quelque sorte l’équivalent de la maturation en fût de chêne du cognac). Au bout de ces six semaines, le bouilleur de cru mettra la Mirabelle en bouteille après filtration à l’aide de filtres à café !
De nos 110 kg de « soupe », nous avons obtenus, après 8 heures de travail, environ 25 litres d’eau de vie…
P. T.-H.
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