Le dernier ouvrage de Philippe de Villiers, « Les cloches sonneront-elles encore demain ? », éd. Albin Michel, frappe fort dès le début. Après avoir publié en octobre 2015 « Le moment est venu de dire ce que j’ai vu » (voir ci-dessous) dans lequel il étrillait le monde politique et parlait de la France en perte de vitesse, pour ne pas dire plus, le voici, en octobre 2016, publiant un nouvel ouvrage dans lequel il entend démonter les rouages de la pénétration de l’islam politique dans la société française. Peu de monde est épargné, pas même le clergé catholique ; les ecclésiastiques eux aussi se retrouvent sur le banc des accusés de ce catholique revendiqué :
« Monseigneur Dubost bat sa coulpe et confie sa préférence « pour que des églises deviennent des mosquées plutôt que des restaurants ». On ne veut pas rester en arrière du mouvement. L’idée d’abandonner un lieu de culte à une religion concurrente ne choque pas la cohorte des dévots utiles » p. 13
Et plutôt que de se livrer à un inventaire trop long et trop fastidieux des actions œcuméniques des curés avec l’islam, de Villiers, connaissant bien les proverbes français dont le célèbre « il vaut mieux s’adresser au Bon Dieu qu’à ses saints » constate amèrement que le vicaire du Christ sur Terre a fait son choix :
« Lors de son voyage à Lesbos, François a décidé de ramener à Rome des familles musulmanes plutôt que chrétiennes. Lui aussi a fait son choix, c’est l’Eurislam. » p.86
Selon lui, et il n’a peut-être pas tort, c’est la fameuse phrase de Mitterrand : « ils sont chez eux chez nous ». p.24 qui servit de signal de départ à la conquête de l’islam politique.
Mais dans son inventaire sur l’état catastrophique du fait migratoire aujourd’hui, qui est le résultat d’une politique décidée et appliquée, de Villiers, dans ses deux derniers ouvrages, ne parle pas d’une chose très importante : la formation de notre personnel politique aux USA par la French American Foundation, créée en 1976 conjointement par les présidents Ford et Giscard d’Estaing.
Car nos politiciens sont en grande partie formés aux États Unis par le biais de cet organisme, inconnu du grand public. Pour n’en citer que quelques-uns, François Hollande, Pierre Moscovici, Marisol Touraine, Najat Vallaud Belkacem ont fait partie de ces Young Leaders. Mais la formation ne se limite pas au parti socialiste, la droite aussi est passée par la French American Foundation : Alain Juppé, Valérie Pécresse, Nathalie Kosciusko-Morizet, Laurent Wauquiez.
Dans l’ouvrage, Sarkozy, le grand promoteur immobilier des richesses nationales bradées au Qatar, en prend pour son grade, de Villiers rappelle que sur les conseils de BHL, il fit bombarder la Lybie, après que son Ministre des affaires étrangères, Alain Juppé, eut arraché une résolution au Conseil de sécurité de l’ONU :
« Sa splendide assurance fait froid dans le dos, il appelle (Juppé) à revoir la politique arabe de la France : « Trop longtemps, nous avons pensé que les régimes autoritaires étaient les seuls remparts contre l’extrémisme dans le monde arabe... Je souhaite que le dialogue s’ouvre sans complexes aux courants islamistes, dès lors que les règles du jeu démocratique sont respectées de part et d’autre. » p.62
Rappelons pour mémoire qu’Alain Juppé, alors ministre des affaires étrangères, a reconnu des années après, dans une émission de télévision, ne pas avoir lu le Coran !
Merkel et son aplatissement devant Erdogan ne sont pas oubliés et de Villiers sait trouver la formule adéquate :
« Un accord allait venir, vanté par les chancelleries de l’Union comme un « soulagement » un Munich migratoire » p.66
La métaphore ne manque pas à Philippe de Villiers, il sait user d’images parlantes. Pour illustrer la fascination et le renoncement des élites devant l’islamisation, il utilise le syndrome du lapin :
« C’est le syndrome du lapin dans les phares : attiré par la lumière et comme ébloui, le lapin ne tente aucun mouvement d’esquive » p.74
Sur la même page il illustre sa formule par les propos prophétiques bien connus de Houari Boumediene en avril 1974 :
« Un jour des millions d’hommes quitteront l’hémisphère sud pour aller dans l’hémisphère nord. Et ils n’iront pas en tant qu’amis. Ils iront là-bas pour le conquérir. Et ils le conquerront en le peuplant de leurs fils. C’est le ventre de nos femmes qui nous donnera la victoire » p.74
Ces paroles, prononcées à Lahore devant la Conférence islamique, le sont un an après qu’en France ont été généralisées les cartes de séjour pour les immigrés.
De Villiers cite également l’écrivain algérien Boualem Sansal, avertissant les français :
« Je vous le dis franchement, je crains pour vous. Vous me semblez si peu préparés, pour ne pas dire si indolents ! Je ne sais pas trop non plus si vous vous rendez-compte que vos gouvernants, qui sont d’une pusillanimité indescriptible, vous poussent carrément dans le cauchemar » p.85
Au chapitre treize « Changer de trottoir changer de mémoire » consacré à la réécriture de l’histoire, de Villiers nous régale des propos de Jean-Luc Mélenchon sur la cathédrale de Reims :
« Celle-là, comme toutes les autres, a d’abord été une victoire de l’esprit et des techniques que nous ont données les Arabes, car on les a pas trouvées tout seuls, ni grâce à votre chère Église catholique qui empêchait que les inventions se propagent » p.105
Et de Villiers de donner la référence : France Culture, émission « Répliques » d’Alain Finkielkraut, juin 2011.
Quelque deux cents pages plus loin, l’auteur complète notre culture sur les cathédrales par de petites annotations :
« L’art ogival qui donne naissance à ce que l’on appelle encore aujourd’hui « l’ouvrage français », fit ainsi le tour de l’Europe, depuis la cathédrale de Cologne, copie insolente d’Amiens, jusqu’à celle de Tolède dont la nef est une réplique de Bourges » p. 296
Puisque nous sommes dans la construction, restons-y. Un chapitre entier est consacré à essayer de tordre le cou au mythe moderne de la reconstruction du pays après 1945 par les immigrés. Ce que voudrait nous faire croire la réécriture actuelle de l’histoire. Le titre est maladroitement choisi : « Ce sont les immigrés qui ont fait la France » l’auteur pense mettre dans ce titre beaucoup d’ironie mais il donne lui-même des chiffres qui contredisent l’ironie du titre :
« -D’après le recensement de 1946, 20 000 musulmans d’Algérie résident alors sur le territoire métropolitain- par comparaison, les Italiens sont 450 000, les Polonais 423 000 et les Espagnols 300 000. » p.133
Ce qui ne fait quand même pas loin de 1,2 millions d’étrangers. Comme il n’y avait alors pas d’immigration de peuplement, il y avait en France 1,2 millions de travailleurs immigrés, employés principalement dans l’industrie, l’agriculture et le bâtiment ! Hé donc oui, ce sont les immigrés qui ont en partie reconstruit la France. Mais ces immigrés-là ne venaient pas du Maghreb ni d’Afrique, « au recensement de 1891, on n’avait trouvé que 813 Africains sur le territoire. » P.129. Gageons qu’entre 1891 et 1946 le chiffre n’ait pas augmenté de beaucoup…
On pardonnera facilement cette maladresse, car l’auteur se rattrape largement par des comparaisons qui illustrent la progression de la religion musulmane en France :
« Le marché du halal est en pleine expansion, il représente en France « deux fois celui du bio avec une croissance annuelle à deux chiffres » p.145
Amoureux de la formule qui illustre, de Villiers ne cesse de nous régaler tout au long de l’ouvrage :
« Jacques Attali qui a toujours une idée d’avance dans l’erreur » p.139
Avec un malin plaisir, l’auteur cite de nouveau la fameuse phrase écrite dans le premier numéro de Globe –Il avait déjà cité cette phrase dans son ouvrage précédent- :
« Bien sûr, tout ce qui est terroir, béret, bourrées, binious, bref, « franchouillard » ou cocardier, nous est étranger, voire odieux » chantaient en chœur BHL, Bergé et consorts. » p.164
Au chapitre XXIII intitulé « Ils ont du sang sur les mains » l’auteur frappe fort, très fort :
« Trois générations d’hommes politiques ont livré le pays à l’islam. Comment osent-ils encore se montrer au public pour déplorer ou nier les effets des maux dont ils ont, pendant quarante ans chéri les causes ? Ils savaient. » p.189
À partir du chapitre XXX c’est à un feu d’artifice que se livre de Villiers, non pas dans la critique de nos dirigeants, mais en faisant l’éloge de la France dans la beauté de la langue française. Philippe de Villiers n’est pas qu’un politique, un gestionnaire et un créateur. C’est aussi un poète, une fine plume. Le style de Villiers existe : une phrase, un mot avec un point, deux autres mots sans verbe pour souligner la puissance de la chose évoquée ; le tout ponctué par une harmonie vocale : « Des ombres qui se lèvent le long des colonnes. Des géants. Des gisants de géants. »
Je n’avais jamais lu un politique écrivant avec autant de poésie champêtre et d’amour de la France, parfois avec humour :
« Le premier ivrogne de notre histoire, c’est Noé. Qui donc aurait la mauvaise grâce de reprocher à quelqu’un qui s’est pris un déluge, de se noyer dans l’alcool ? » p.268, tantôt gravement, avec élégance et courtoisie : « Partout ailleurs, on se nourrit. En France, on sait manger. » p. 270
Ça fuse ainsi tout au long des derniers chapitres, comme pour adoucir les vérités lâchées abruptement dans les chapitres précédents. Voulant absolument terminer sur une note d’espoir, l’auteur cite les vers de Victor Hugo (Le laboureur et ses enfants)
« Gardez-vous leur dit-il, de vendre l’héritage
Que nous ont laissé nos parents.
Un trésor est caché dedans. »
On comprend le désir d’adoucir l’ouvrage, mais de Villiers nous a bien précisé que tout est vendu et depuis longtemps aux Qataris et ce que l’on croit qui reste est à l’Arabie Saoudite.
Et puis la métaphore est peut-être mal choisie : dans la fable le terrain est retourné, mais rien ne dit que quelque chose y soit planté, et ici ? Si le terrain c’est la terre de France « défoncée » que va-t-on y semer ?
Confidences politiques ou confession, c’est ce à quoi s’exerce Philippe de Villiers en 344 pages dans Le moment est venu de dire ce que j’ai vu, éd. Albin Michel. Il réussit assez bien l’exercice, qui parfois, fait penser à des mémoires doublées d’une mise en garde. Une de plus ! Il ne se passe pas une semaine sans que ne paraissent un, deux ou trois livres nous avertissant des dangers de l’islamisation, du mondialisme, du politiquement correct, de la catastrophe scolaire de notre nation, de la corruption des politiques et du dévoiement de notre société. Personne ne pourra dire : « je n’étais pas au courant. »
Dans cet ouvrage Philippe de Villiers parle des gens qu’il a rencontrés et connus dans son existence et ils sont nombreux...
Des grands de ce monde, des hommes de pouvoir. De Poutine à Soljenitsyne en passant par Bigeard et Hassan II, quand on y ajoute la presque totalité du « personnel » politique de la Vᵉ, ça fait beaucoup de personnes. De Villiers nous parle des échanges qu’il a eus avec tel ou tel, sans fioritures inutiles et sans traîner en longueur ; que ce soit Mitterrand ou Chirac, les propos qu’il a échangés avec les chefs d’État sont rapportés sincèrement. Il y a tout lieu de le croire.
Au fil des chapitres, il égrène ses expériences de député européen. La découverte du « plombier polonais », la mise au grand jour de la directive Bolkestein, c’est lui. Il nous raconte sa découverte de la puissance et du sans gêne des lobbies à Bruxelles. Il nous relate également son expérience de candidat à la présidence de la République, ses combats politiques et écologiques. Car la presse en a très peu parlé, mais il s’est grandement engagé dans le combat contre le gaucho, un insecticide tueur d’abeilles. C’est en connaisseur qu’il parle d’agriculture ; un chiffre page 274 :
« Avec soixante-dix mille tonnes de pesticides répandues dans nos sols, la France est devenue le premier consommateur européen. »
Il évoque également la création du Puy du Fou, tout au long de l’ouvrage il fait part de ses idées, de ses remarques critiques sans tergiverser et avec beaucoup de franchise.
Un chapitre entier est consacré à l’Indochine, sujet tabou. Parlant avec le général Bigeard, ce dernier lui confie :
« - Qui veut bien encore se souvenir, interrogeait Bigeard, des cercueils caillassés par les dockers de la CGT au port de Marseille, des soldats insultés à leur retour en métropole, du matériel saboté dans les usines d’armements ? » p.71
Dans ce court chapitre sur l’Indochine de Villiers revient rapidement sur l’affaire Boudarel (https://www.youtube.com/watch?v=9v5WQZMEOqU). La Vᵉ République a connu tellement de scandales qu’ils se chassent l’un l’autre et on finit par les oublier. L’affaire Boudarel est quand même de taille. En 1991 au Sénat, lors d’un colloque sur le Vietnam, un ancien prisonnier du Vietminh reconnaît son tortionnaire, il se prénomme Jacques Boudarel, il est rentré en France après l’amnistie de 1966 et enseigne en Université. Il est également chercheur au CNRS. Les anciens déportés du camp de la mort où il exerçait déposent plainte mais l’amnistie prévaut. Surtout que l’intelligentsia (Pierre Vidal-Naquet, Lacouture, Gilles Perrault etc.) s’est mobilisée en faveur du tortionnaire. Ce dernier fera valider pour sa retraite ses années de commissaire politique du Vietminh en « voyage d’études en extrême orient ! »
De Villiers ne se contente pas de raconter, il écrit bien. Il a le sens de la formule et peut se passer du style académique pour rendre son récit vivant et plaisant à lire. Sur Bruxelles et les paysans par exemple, la formule est savoureuse: « Ils ont appris un nouveau métier : planteurs de primes. » p.97
Quelquefois pourtant l’auteur manque de discernement, peut-être par manque d’informations mais peut-être aussi par idéologie. En général dès que l’on s’attaque à Freud la droite catholique est ravie. Philippe De Villiers se réclame de cette droite catholique et c’est tout à son honneur :
« J’ai été frappé par ce qui est arrivé au philosophe Michel Onfray. Il était une coqueluche de la bienpensance, courtisé, encensé, adulé. Une brillante intelligence. Et Libre. Le jour où il osa publier un livre critique sur Freud, Le crépuscule d’une idole, tout bascula. « Une avalanche d’insultes m’est tombée dessus confie-t-il. J’ai vu des gens qui, au nom de la liberté d’expression voulaient interdire la diffusion de mon cours sur France Culture. J’ai découvert ainsi les dégâts de l’idéologie dominante. » p.116
Certes, Michel Onfray a été insulté et des gens ont agi contre lui à la sortie de son livre. Mais son livre est un tissu d’insultes envers Freud, truffé de mensonges, d’erreurs grossières et de mauvaise foi ! De Villiers n’est certainement pas un érudit de Freud, mais de là à voir en Michel Onfray un parangon de vertu découvrant les méfaits de l’idéologie dominante, comme il le dit, il y a une marge !
Cette idéologie dominante au matérialisme boboïste, le philosophe ne la subit pas : il serait plutôt à ranger dans la catégorie de ceux qui l’imposent !
De Villiers ne doit pas ignorer que le « philosophe » créa l’université populaire de Caen en réaction à la présence de Jean-Marie le Pen au deuxième tour de la présidentielle et pour empêcher le « fascisme » de poindre. Michel Onfray à soutenu tour à tour Olivier Besancenot, José Bové, puis de nouveau Besancenot, lors de différentes élections présidentielles, soutenant au passage le Front de Gauche aux européennes de 2009 !
Après avoir longtemps parlé du souverainisme, de Villiers, tristement nous annonce qu’il est mort :
« Avec la mort de Seguin, la défaite de Chevènement, la retraite de le Pen et la disparition de Pasqua, sonne le glass du souverainisme. La machine et le système l’ont emporté. » p.245
On reste tout de même un peu surpris de voir apparaître le nom de Le Pen à la page... 245 ! Curieusement ce sera la seule fois dans le livre ou Le Pen sera cité. Le Pen boit de la bière et de Villiers du thé. Plus avant dans son livre, l’auteur nous a parlé de son programme à la présidentielle à la tête du Mouvement Pour la France. Jean-Marie le Pen lui avait alors reproché d’avoir copié le programme du Front National, en reproduisant même les coquilles d’imprimerie !
Comme il est écrit dans Wikipédia :
« Le candidat souverainiste se revendique comme en dehors du système politique qu'il nomme, à l'instar de Jean-Marie Le Pen, le « système UMPS », ce que lui conteste vigoureusement le Front national, qui pointe la constance des alliances politiques du MPF avec l'UMP et l'UDF, au niveau des collectivités locales. »
Quoi qu’il en soit, l’ouvrage est excellent, bien écrit, très agréable à lire (les chapitres sont courts et concis) et on y apprend plein de choses, pourquoi se priver ?
M.M.
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