La rencontre entre Poutine et Trump, lors du sommet du G20 les 7 et 8 juillet, n'a pas radicalement changé l'état des relations entre les États-Unis et la Russie, la puissance de l'administration américaine se faisant sentir. Finalement, la coopération russo-américaine pour renforcer la sécurité dans le Cyber-espace attendra des temps meilleurs et la question de la normalisation des relations diplomatiques entre les deux pays a été remplacée par un chantage de bas étage. Bref, la vie continue son cours, il est difficile de se défaire de ses habitudes. Refus de visas aux diplomates russes, chantage sur les biens immobiliers de la mission diplomatique russe aux États-Unis etc. Comment en est-on arrivé là ?
En décembre 2016, juste avant de devoir quitter ses fonctions, le Président B. Obama a expulsé 35 diplomates russes et mis sous séquestre une partie des biens immobiliers appartenant à la mission diplomatique russe1. La réponse avait beaucoup plu à la communauté internationale s'extasiant à qui mieux mieux sur le génie de la réponse asymétrique. En effet, la Russie avait alors décidé d'inviter les enfants des diplomates américains à l'Arbre de Noel au Kremlin.
En effet, quel soulagement, la Russie n'a in fine pas répondu. Il devient alors intéressant de savoir jusqu'où il est possible de violer en toute impunité le droit international, sans que le pays ne protège ou ne défende ses diplomates. Puisque, en fin de compte, c'est bien de cela qu'il s'agit: un rapport de force qui prend des diplomates en otage. Primaire et semble-t-il efficace.
L'Estonie et la Moldavie s'y sont essayées à leur tour à la fin mai2. Cette fois-ci, la Russie a réagi et a pris des mesures équivalentes. Moralité, les États-Unis peuvent, mais pas les autres pays. Cette exception américaine semble bel et bien exister ...
Il y a eu, avant cela, la rencontre Trump/Poutine au G20. Il est possible qu'ils aient abordé la question. Mais même si Trump voulait normaliser la situation, il ne le pourrait pas. La Russie n'a pas pris de mesures en réaction à l'expulsion de ses diplomates. Il ne peut pas y avoir « d'échange ». Il faudrait un grand geste des États-Unis, gratuit, pour rétablir le bon droit. Et pourquoi cette grandeur d'âme ?
Le conseiller du Président américain a déclaré, justement à ce sujet, il y a quelques jours devant les caméras de CNN3 qu'ils sont prêts à revoir la décision des biens immobiliers russes séquestrés, s'ils obtiennent quelque chose en échange, afin de donner une chance aux relations russo-américaines.
Mais la Russie n'a rien « à échanger », alors les enchères montent. Un chantage est officiellement annoncé : les biens immobiliers pourront être rendus ... si la Russie se comporte bien en Syrie4. Il est vrai que l'État islamique recule, il faut l'aider. Quel est le rapport? Aucun. Le but est ailleurs.
L'impunité étant la règle, les États-Unis viennent alors de refuser leurs visas aux diplomates qui devaient remplacer ceux qui furent expulsés. Cette fois-ci aussi le Ministère des affaires étrangères5 a réagi et menace de mesures de rétorsion : expulsion de diplomates américains en poste en Russie pour que le volume des deux représentations soit équivalent, mise sous séquestre de biens, etc. Autrement dit, ce qu'il aurait fallu faire en décembre dernier pour que les États-Unis ne se sentent pas les mains libres.
La Russie défend une position légaliste6: c'est du chantage et c'est inacceptable. Oui, c'est inacceptable, mais c'est ainsi. Rappeler l'importance de respecter les règles internationales uniquement en paroles a un effet très réduit, comme nous le voyons, avec certains interlocuteurs. Parfois répondre de manière très ciblée permet justement de rappeler les risques évités par le respect de ces règles. Un peu comme avec les enfants.
Aujourd'hui, le vice-ministre des affaires étrangères russe S. Riabkov rencontrera à Washington son homologue américain T. Shennon. Si aucun accord n'est trouvé, la Russie affirme mettre en œuvre ses mesures de rétorsions. Espérons que les mesures post-modernes s'arrêteront là, que, saison oblige, les enfants des diplomates américains en poste en Russie ne soient pas invités dans un club de vacances quelconque.
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