Le départ d’Ivan Blot a profondément choqué l’élite intellectuelle des deux nations, russe et française.
C’est avec un profond regret que nous voulons vous faire part du décès de l’un des Français les plus illustres de notre temps. Il s’agit d’Ivan Blot, homme politique, pendant de longues années Président du Club de l’Horloge, patriote de la France et une bonne connaissance de Vladimir Poutine.
L’auteur de cet article a été en termes plus qu’amicaux avec Ivan. Nous nous sommes connus il y a de nombreuses années et avions partagé le même champ d’action.
Il était l’incarnation même de ce qu’on appelle le « vrai Français » : fin observateur, esprit cartésien, mais, en même temps, profondément catholique croyant. Toute sa carrière au sein du Ministère de l’Intérieur où il est monté jusqu’au grade d’Inspecteur général aussi bien que dans sa vie privée, familiale ou quand il faisait de la politique, était marquée par une sincérité et un humour au-delà de toutes les épreuves qu’il avait dû endurer dans sa vie. En effet, Ivan a été député et euro-député. Il a tenu sur les fonts baptismaux la création de la droite française, a noué des relations professionnelles plus que solides avec Jean-Marie Le Pen en contribuant par ses idées à l’élaboration du concept de base du Front National.
Il est à dire que Blot maîtrisait parfaitement la plume qui était souvent, entre ses mains, plus acéré qu’un bistouri. Ivan était également docteur ès sciences économiques et professeur à Sophia Antipolis, Université de Nice. Ses ouvrages sont nombreux et très étoffés, car Blot étudiait en profondeur un sujet avant de s’exprimer.
Une fois retraité, il s’est mis à apprendre sérieusement le russe ou plutôt à se le remettre en mémoire, car sa mère était d’origine slave. Un jour il me raconta qu’aux chansons militaires de son père, commandant du premier porte-avions français d’ailleurs, se mêlaient les berceuses en langue russe de sa mère. On peut dire que la Russie a toujours été son dada. Et comme son départ du ministère lui a permis de se déplacer plus librement à l’Est du continent Européen, il s’est mis à visiter notre pays.
Moscou l’a très vite apprécié à sa juste valeur. Ainsi, il s’est fait connaître à travers la création d’une chaîne de télévision franco-russe ProRussia.tv dont le concept s’est cristallisé dans le bureau du chef du service français de la « Voix de la Russie » de l’époque Mikhaïl Kourakine. Cette chaîne a su attirer à travers l’internet un auditoire de l’ordre de 1,5 millions de visites uniques à titre mensuel ce qui est également à mettre à l’actif d’Ivan. Et c’est bien Blot qui a offert à Radio Sputnik les fréquences FM à Paris ce qui est, littéralement parlant, hors d’atteinte pour une radio étrangère.
Il est à dire que les activités franco-russes de mon ami ont été vraiment appréciées à leur juste valeur : membre du très prestigieux Club Présidentiel Valdaï (créé et chaperonné par Vladimir Poutine lui-même), Blot a rencontré à plusieurs reprises, en compagnie de sa charmante épouse Cendrine, le chef de l’État russe. Il a eu même l’occasion de lui offrir ses écrits.
Confronté à sa maladie, Ivan a tenu le coup. Il y a tout juste un an, déjà exténué par ses problèmes de santé, il a trouvé suffisamment des forces pour se rendre à Yalta où la revue Interaffairs.ru (Mejdunarodnaya Jizn, Ministère des Affaires Étrangères de Russie) a organisé une grande conférence sur les pays de la CEI.
Comme toujours, Blot a été brillant et, selon le rédacteur-en-chef de la revue M. Armen Oganessian, a su influencer les idées générales des chercheurs présents à l’événement leur faisant part de ses conclusions qu’il avait élaborées lors de son travail au sein du dispositif antiterroriste français et européen.
Son départ est douloureux à vivre parce qu’il laisse un sentiment de vide. Comme disaient les Romains, « cet homme a vraiment vécu ». Il cherchait coûte que coûte à améliorer le relationnel avec la Russie croyant que le concept du monde multipolaire de Evguéni Primakov pouvait représenter la voie de salut pour la France et les prémices d’un monde européen sur l’axe Paris-Berlin-Moscou. La revue Interaffairs.ru regrette beaucoup son décès prématuré et présente ses condoléances à la famille, aux proches et à tous les amis du cher défunt.
A.A.
La rédaction de « Méthode » s’associe à cet hommage et adresse à son épouse et ses enfants toute sa sympathie.
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