Il y a quelques semaines, j’ai eu le plaisir de visiter le musée « Massey », musée international des Hussards situé dans la belle ville de Tarbes. Une merveilleuse journée pour redécouvrir tout à la fois l’histoire insolite de ces soldats d’élite et la diversité de leurs uniformes chamarrés.
Niché au cœur d'un jardin "remarquable", ce musée est le seul au monde à s'intéresser aux hussards, depuis leur origine et jusqu'à ce jour. Ce corps d’armée de cavalerie légère ayant contribué au renom de la ville de Tarbes, il était donc tout naturel que la ville profite de ce cadre exceptionnel pour y mettre à l’honneur sa collection sur l'un des "phénomènes" militaires les plus insolites et les plus séduisants, aujourd'hui encore lié à un certain imaginaire.
LE MUSÉE MASSEY
Le musée Massey porte le nom de son père fondateur : Placide Massey (1777-1853). Ce botaniste, horticulteur de talent et directeur du Potager de l’Orangerie du Parc de Versailles, achète, entre 1825 et 1852, aux abords de la ville, onze hectares de terrain pour y poser sa demeure au cœur d’un arboretum aux essences rares.
Il se charge du parc et confie les plans de la maison à l’architecte tarbais Jean-Jacques Latour qui imagine un palais cairote agrémenté d’un jardin d’hiver sur la façade sud, surmonté d’une tour « minaret », observatoire de la vie du jardin et des Pyrénées. À sa mort, selon les termes de son testament, il lègue l’ensemble de ses propriétés à Tarbes. Le projet initial est partiellement abandonné et repris en 1858 sous l’impulsion d’Achille Jubinal (1810-1875), député des Hautes-Pyrénées depuis 1852 et maire de Bagnères-de-Bigorre qui, souhaite doter sa circonscription de « collections artistiques ».
La maison de Placide Massey est agrandie de deux salles au sud, destinées à recevoir un musée et une bibliothèque. Le jardin d’hiver est déplacé à l’ouest du parc, actuelle orangerie. En 1864 les premières salles sont inaugurées, un muséum d’histoire naturelle pour conserver l’esprit de Placide Massey et un musée des beaux-arts pour présenter les collections initiées par Achille Jubinal.
En 1955, Marcel Boulin, jeune conservateur, élève de l'ethnologue Georges-Henri Rivière, est nommé à la tête du musée. Il s’intéresse à la société agropastorale des Hautes-Pyrénées, au « cheval tarbais » qui sera à l’origine de l’implantation des régiments de hussards à Tarbes. La nouvelle collection "Hussards" engage la ville dans une campagne de travaux d'agrandissement entre 1957 et 1963.
En 2006, la ville entreprend la rénovation et la modernisation de l’établissement. Les travaux débuteront en juin 2009 pour s’achever en 2011.
LES HUSSARDS
Ce corps de légende a vu le jour en Hongrie au XVIe siècle et s’est répandu à travers l’Europe entière, atteignant même au XIXe siècle plusieurs pays des deux Amériques. En France leur création est plus récente : le 17 juillet 1635 le Cardinal de Richelieu suggéra au Roi Louis XIII leur création, puis sous Louis XIV est mis sur pied un régiment de Hussards fort de 500 cavaliers et dont le commandement est confié au Baron Corneberg. Puis viennent les régiments de Poldeack, de Filtz, de Monteil, suivi de ceux de Verseilles, de Saint-Géniès, de Rattzky et de Lynden. Après une mise à l’épreuve par le maréchal de Luxembourg, Louis XIV fera former le 19 octobre 1692 un premier régiment de hussard royaux, fort de 150 hommes. Ce n’est toutefois qu’en 1720 que le Premier Régiment de Hussards français Bercheny est créé et incorporé dans l’armée régulière.
Ces cavaliers prestigieux de ces corps d’élite sont de tous les combats, de toutes les grandes batailles livrées depuis cinq siècles : les hussards polonais de Sobieski sauvent Vienne de l’emprise turque en 1663 ; les hussards hongrois libèrent leur pays, au XVIIe siècle, de l’envahisseur turc ; les hussards prussiens remportent, en 1757, à Rossbach ; une éclatante victoire ; les hussards autrichien, en 1809, sauvent la situation à Essling ; les hussards russes d’Izioum livrent , en 1813, à Saint-Dizier, une bataille sans merci aux troupes napoléoniennes…
Tout amateur d’histoire connait la silhouette si caractéristique du hussard, cavalier léger emblématique des guerres du Premier Empire. Spécialisés dans l’escarmouche et la reconnaissance, les régiments de hussards étaient réputés pour leur hardiesse et leur impétuosité, n’hésitant pas à montrer leur bravoure lors de faits d’armes spectaculaires. Citons parmi ceux-ci les exploits de la Brigade Infernale du général Charles Louis de La Salle, formée des 5ème et 7ème hussards, capturant avec 500 cavaliers la forteresse de Stettin, comptant 6000 hommes de garnison et 160 canons… Ce général au tempérament particulièrement enflammé aura sans doute fait plus que nombre d’historiens pour entretenir la réputation de ces cavaliers d’élite, fondant la société des assoiffés, et ayant eu cette phrase célèbre « tout hussard qui n’est pas mort à 30 ans est un Jean-Foutre ».
UNE COLLECTION UNIQUE
Le parcours muséographique, constitué de séquences historiques, invite le visiteur à remonter de manière chronologique l'histoire des Hussards en France et dans le monde et à découvrir les uniformes, reflets des modes passées, à l'origine du rayonnement de ces militaires pendant plus de quatre siècles.
C'est un ensemble spectaculaire de 130 mannequins qui est présenté, alternant uniformes complets, bustes, pièces d'habillement ou d'équipement d'une richesse et d'une diversité incroyable depuis le XVIIème siècle jusqu'à l'uniformisation progressive au XXème siècle.
Les uniformes sont extraordinaires que richement ornementés. Ils répondent à une tactique pour les soldats. D'abord, ils font peur par leur couleur et les richesses cousues sur le poitrail puis, grâce à ce petit cheval nerveux et vif, les militaires sont rapides dans leurs actions. » D'après les écritures, la rangée de boutons était chargée de dévier la course de la lame du sabre.
De nombreux outils d'aide à la visite vous permettent de restituer dans leur contexte les objets, armes et uniformes. Ainsi les collections et l'histoire deviennent accessibles et compréhensibles par le plus grand nombre et chaque visiteur peut devenir acteur de sa visite.
De leur origine orientale, ils conserveront une tenue bien particulière, avec une coiffe souvent ornée de fourrures, un pourpoint et un manteau courts qui deviendront le dolman et la pelisse.
Ils vont surtout introduire dans la cavalerie française, jusque-là attachée aux lames droites utilisées d’estoc, l’usage des épées courbes. À côté du Hegyestor, sorte de grande épée de près de 1.50m et destinée à embrocher l’ennemi, ils étaient dotés d’une étrange épée recourbée inspirée des armes ottomanes nommée Szablya.
C’est avec frénésie que les hussards sabrent sans peur mais aussi sans reproche. Ils le font avec audace et endurance… N’a-t-on pas dit qu’ils ne descendaient pas de leurs chevaux pour dormir ? Quoi qu’il en soit, leurs équipements sont conçus de telle manière qu’ils peuvent « vivre » sur leurs chevaux.
Leur paquetage leur est accessible à tout moment : Le cordon de colback ou de shako permet de hisser la coiffure malencontreusement tombée ; la courroie de la baguette indépendante du mousqueton a été conçue, dans le modèle 1816, pour permettre d’atteindre facilement à chaque instant, cet accessoire indispensable voire vital.
On retrouve ainsi à chaque époque dans les 34 pays les mêmes caractéristiques d’harnachement, d’équipement, d’habillement et d’armement comme le montre les 150 mannequins exposés. Longtemps la pelisse et la sabretache restent leur apanage ; leurs particularités vestimentaires sont de toutes les époques et par la suite plagiées. S’ils sont redoutés par leurs ennemis, ils sont néanmoins aimés des femmes et si leurs compagnons de combats les jalousent, leur prestige demeure, car il n’est pas seulement dû à leur uniforme rutilant, mais aussi à leur savoir-faire et à leur efficacité.
Charger un pistolet est une tâche méticuleuse, mais cela devient encore plus difficile lorsque cela doit être fait au crépuscule, sous une pluie battante, monté en selle sur un cheval en mouvement. Les hussards étaient formés pour cela, et étaient sévèrement punis (de 200 coups dans le dos avec une tige de métal par exemple) s’ils mettaient trop de temps à recharger ou bien si leur pistolet tirait à blanc. Et ce n’est qu’un exemple de la sévérité du service des hussards parmi tant d’autres.
Les hussards et leur uniforme chamarré traverseront tout le 19ème siècle, combattant sous le second Empire, en Crimée, en Amérique Latine… Seule la disparition définitive de la cavalerie à cheval les verra disparaitre dans leur forme traditionnelle, au profit de régiments de blindés légers.
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